Le plan cafétéria : un équilibre difficile à trouver

« Grâce à la négociation des composantes du plan, nous avons désormais notre mot à dire »

Les plans cafétéria sont tendance à l’heure actuelle. De plus en plus d’entreprises et organisations proposent des formules flexibles comprenant toujours plus d’avantages pour de plus en plus de membres du personnel. C’est un moyen fiscalement avantageux d’offrir un bonus aux travailleurs. Mais cet avantage fiscal présente également des aspects problématiques.

Les plans cafétéria ne remplissent pas vraiment les caisses des fonds publics. Et ils contribuent encore moins à la sécurité sociale, qui garantit à tous la perception d’un revenu en cas de maladie, de chômage ou de retraite. Or, cette sécurité sociale est déjà bien maigre, et n’a vraiment pas besoin de cette restriction.

Cette dualité complique la tâche des représentants du personnel à qui les employeurs (et les collègues) demandent de conclure des accords concernant ces plans cafétéria. Nous donnons ci-dessous la parole aux représentants du personnel Marten Van Hoorn au sein de Beobank et Patrick New au sein de Siemens.

Van Hoorn : « En 2019, notre employeur nous a demandé pour la première fois de conclure une CCT relative à un plan cafétéria. Nous avons tout d’abord rejeté cette idée. Les raisons sont évidentes : le système sape la sécurité sociale, et nous ne voulons pas encourager les déplacements en voiture – le package comprenait aussi des accords relatifs à des voitures de leasing. En outre, il implique des incertitudes à plus long terme : que se passera-t-il si le prochain gouvernement décide soudainement de ne plus avoir recours aux plans cafétéria ? Et quelles conséquences le plan a-t-il en cas de perte d’emploi ou de maladie grave ? »

Vous avez toutefois changé d’avis ultérieurement…

Van Hoorn : « Nous en avons beaucoup discuté. Mais en 2020, nous sommes finalement parvenus à un accord. L’argument principal qui nous a convaincus est que l’absence d’un plan cafétéria réduisait l’attrait concurrentiel de notre employeur auprès de nouveaux candidats. De leur côté, d’autres banques avaient mis en place un plan cafétéria. Il devenait de plus en plus difficile d’attirer de nouveaux profils. Les candidats étaient très demandeurs de ce système. En nous accordant sur le plan cafétéria, nous avons pu déterminer les éléments dont peuvent profiter les travailleurs grâce au plan en échange de leur treizième mois. La partie mobilité du plan comprend une intervention pour les voitures et les vélos de leasing, les déplacement en train en première classe et les tickets de parking. Il propose également la location d’un PC ou d’une tablette, par exemple, ou le financement du pilier de pension individuel. Le don à une association caritative est également possible. »

Chez Siemens, vous n’avez pas adhéré au plan cafétéria. Pourquoi ?

New : « Chez Siemens, le plan cafétéria a été introduit dans le cadre d’une politique unilatérale de l’employeur. Il n’y a donc pas eu de concertation sociale. Mais de toute façon, en tant que syndicat, nous n’aurions jamais adhéré à ce plan. Dans le secteur de la métallurgie, dont Siemens fait partie, la CSC a décidé par principe de ne pas approuver les plans cafétéria car ils fragilisent trop la sécurité sociale. Notre employeur a lui aussi insisté sur la mise en place d’un plan cafétéria. Pour la même raison que Beobank : attirer les candidats. Mais en interne, la demande était très limitée. Parmi les 800 membres du personnel de Siemens, seuls 50 adhèrent au plan cafétéria à ce jour. Les aspects qui rencontraient le plus de succès étaient la voiture et les tablettes. Un certain nombre de collègues ont opté pour un financement alternatif du montant qu’ils devaient auparavant verser pour leur voiture de leasing. D’autres ont opté pour le paiement du troisième pilier de pension ou pour des jours de congé supplémentaires. Le leasing de vélos n’est pas très populaire chez nous. »

Tout le monde peut-il adhérer au plan ?

New : « Presque tout le monde. Quelques groupes ne sont pas concernés, comme les stagiaires et les expatriés. Mais sinon, tout le monde peut y adhérer. »

Van Hoorn : « Chez Beobank, tous les membres du personnel peuvent avoir recours au plan cafétéria. Ils peuvent bénéficier d’avantages équivalant à leur treizième mois, cotisation patronale comprise. Il a également été envisagé d’inclure des primes dans le plan. Mais cette idée n’a pas été retenue. En effet, si la prime n’est pas suffisamment élevée ou si elle n’est pas octroyée, le travailleur devra payer lui-même un supplément ou sacrifier une partie de son salaire. Cela était impensable pour nous. Un autre point de discussion était que l’employeur souhaitait retirer les éléments peu populaires du plan. Mais cela représente évidemment un inconvénient pour les personnes qui ont choisi ces options. Grâce au fait que nous avons pu négocier les composantes du plan, nous avons désormais notre mot à dire sur ces aspects. »

Que comprend le plan chez Siemens ?

New : « Chez Siemens, le plan va plus loin. Les travailleurs peuvent échanger jusqu’à 10 % de leur salaire mensuel. C’est beaucoup plus que dans d’autres entreprises. Par conséquent, le plan a un sérieux impact sur le treizième mois et le pécule de vacances, par exemple. Le plan cafétéria a également des répercussions à plus long terme. Le « nouveau » salaire, après déduction du pourcentage échangé, sert de base au montant de la future pension, du RCC, de l’indemnité de maladie… Et le pourcentage échangé n’est plus indexé. Je pense que ces inconvénients refroidissent beaucoup de collègues. Pour les personnes ayant un revenu variable, le calcul est plus complexe. D’autant plus que le montant restant à échanger à la fin de l’année est taxé différemment. »

Comment votre choix a-t-il été perçu en interne ?

Van Hoorn : « Il était particulièrement important de bien informer les membres du personnel de nos choix. Nous avons expliqué chaque facette du plan en toute transparence, puis nous avons laissé le choix à chacun d’y adhérer ou non. Cela a été très apprécié. Près de la moitié de nos collègues a opté pour le plan. Mais cela n’implique pas qu’ils en font réellement usage. J’y ai moi-même adhéré et je n’ai pas encore profité des avantages qu’il m’offre. Ils ne me semblent pas assez intéressants. Je vis aux Pays-Bas, où j’ai une voiture en leasing à titre privé, ce qui est plus intéressant. Certains collègues y ont donc adhéré en théorie, mais ils hésitent encore à en profiter en pratique, ou décident de ne pas exploiter ses avantages après avoir fait quelques calculs. Donc non, un plan cafétéria n’est pas toujours aussi intéressant pour tout le monde. »

New : « Nous avons également communiqué en toute transparence sur le plan. Nous avons informé les travailleurs sur les avantages du plan et avons souligné les aspects négatifs. Et de nombreux collègues nous ont suivis. »

Never Work Alone 2024 | Author: Jan Deceunynck | Photo: Shutterstock