Les indépendants méritent également d’être protégés

United Freelancers (UF), le service créé par l’ACV pour les indépendants, existe depuis cinq ans. Et nous pouvons dire que c’est une réussite. Plus tôt cette année, un webinaire pour les indépendants débutants a été suivi par plus de 3 000 participants. Un chiffre qui ne tient pas compte des visionnages ultérieurs – le webinaire est toujours accessible sur le site web.

Raluca Aradoaei, qui a participé à son organisation, dresse un bilan positif. « On peut dire que c’était une période chargée. Il fallait non seulement organiser les webinaires, mais aussi répondre aux questions individuelles des indépendants. Sans oublier les dossiers collectifs. Avec un certain nombre de jeunes architectes, nous nous sommes penchés sur les conditions salariales et de travail, ainsi que sur les stages. Car on abuse beaucoup de la passion des jeunes starters, qui sont trop peu rémunérés pour ce qu’ils font. »

Service individuel

La prestation de service individuelle est surtout assurée par Kevin Pletincx et Christophe Boribon, qui examinent chaque jour les demandes de membres. « Ils vérifient les contrats, donnent des conseils aux starters ayant des questions, les guident si des problèmes surviennent, et jouent un rôle de médiation avec leurs clients si ça coince quelque part. Beaucoup de questions portent sur les clauses dans les contrats, comme celle de non-concurrence. Celle-ci pose des difficultés à de nombreux indépendants. Ils veulent arrêter la collaboration avec un client, mais ne peuvent pas rester dans le même secteur parce qu’une clause dans leur contrat leur interdit de travailler pour des concurrents de ce client. Pour un coach de carrière qui travaillait en sous-traitance, nous avons porté l’affaire devant le tribunal du commerce, qui a finalement déclaré nulle la clause de non-concurrence (voir encadré). Car nous défendons nos membres indépendants comme nous le faisons pour nos membres « classiques », jusqu’au tribunal. Nous constatons que notre prestation de services fait beaucoup parler d’elle. C’est la meilleure promotion pour notre travail. Un dossier mène à un autre dossier. C’est très bien. Cela prouve que nous faisons du bon travail. »

Intérêts collectifs

Cette succession de dossiers individuels mène également à la défense d’intérêts collectifs. « Nous constatons que dans certains secteurs, beaucoup de problèmes dépassent l’aspect individuel. Dans le milieu des coursiers à vélo, nous travaillons depuis plusieurs années sur les droits des personnes travaillant via une plateforme, dont nous estimons qu’elles devraient être salariées. Par ailleurs, nous avons fixé une rémunération minimale pour les indépendants dans le secteur culturel. De même, nous travaillons actuellement avec des interprètes sur des directives en vue d’instaurer des tarifs minimums dans ce secteur. Ce n’est pas simple. Nous avançons difficilement. Il faut trouver du temps et coordonner les agendas. Et les indépendants tiennent aussi à leur individualité. Mais souvent, nous voyons des situations affligeantes où des personnes sont exploitées en raison de leur passion. Elles aiment tellement leur travail qu’elles en oublient de fixer des limites. C’est alors que les clients en profitent. »

« Le travail que nous avons récemment entamé avec les architectes s’inscrit dans cette même logique. Jusqu’à un certain âge, la passion suffit pour tenir le coup. Mais au bout d’un certain temps, on aspire à davantage de sécurité pour construire sa vie. Lorsque la passion est minée par de mauvaises conditions de travail, la situation est problématique. C’est sur cet aspect que nous souhaitons agir – conjointement avec Dear Architects et Belgian Architects United, des groupes d’architectes qui défendent les mêmes intérêts et ont trouvé en nous un partenaire expérimenté. Nous venons à peine de commencer, mais je sens déjà que ce ne sera pas facile. Ce n’est d’ailleurs jamais facile. Mais nous réussirons, comme dans le secteur culturel. »

Faux indépendants

Un point délicat est le faux travail indépendant. Il est parfois reproché aux indépendants d’affaiblir le statut de salarié en tant que faux indépendants. « Il y a parfois de gros préjugés », explique Raluca. « Bien entendu, UF ne vise pas à promouvoir le faux travail indépendant. Mais un indépendant qui propose ses services dans une entreprise n’est pas forcément un faux indépendant. Il existe des critères clairs qui distinguent les vrais indépendants des faux indépendants, comme l’autonomie et la tarification. Un autre aspect qu’il faut garder à l’esprit est que tout n’est pas toujours rose non plus pour les indépendants. Eux aussi doivent parfois affronter leurs clients. Ils ont leurs problèmes spécifiques, mais il y a souvent des parallèles avec ceux des salariés. Notre savoir-faire contribue alors à progresser ensemble, dans le dialogue. »

« Il est agréable de se sentir soutenue »

Elke* est coach de carrière. Elle aide les gens à reprendre leur carrière après un burn-out. Jusque récemment, elle le faisait en sous-traitance pour un grand centre de services carrière. Mais lorsqu’elle a voulu travailler en dehors de ce cocon, elle s’est heurtée à un refus de ce client, qui invoquait une clause de non-concurrence. Elle ne pouvait pas travailler en tant que coach de carrière pour son propre compte. « Heureusement, je me suis rappelée d’un courrier d’United Freelancers, que j’avais reçu indirectement, car je n’étais pas membre. Mais après quelques recherches, j’ai retrouvé UF et j’ai pu leur demander conseil. » Et elle ne l’a pas regretté. « Ils se sont tout de suite occupés de mon dossier. Ils m’ont comprise et soutenue. Ils sont entrés en discussion avec mon client, mais cela n’a pas abouti à grand-chose, car il ne voulait pas céder. Finalement, nous avons porté l’affaire devant le tribunal, qui a déclarée nulle la clause de non-concurrence. » Elke est très heureuse du soutien qu’elle a reçu d’UF. « C’est un sentiment très agréable que de pouvoir compter sur quelqu’un en cas de pépin, même en tant qu’indépendante. L’ACV fait bien de proposer ce service. Je suis heureuse qu’elle ait évolué. La réalité est que davantage de gens optent aujourd’hui pour une activité indépendante. Mais même lorsqu’on fait ce choix, on n’a pas envie d’être abandonné à son sort et on a besoin de renfort ou de soutien en cas de conflit avec un client. Cela ne vaut pas seulement pour ceux qui travaillent sous le statut de salarié. »

*Elke est un nom d’emprunt

 

« United Freelancers (UF), le service créé par l’ACV pour les indépendants, existe depuis cinq ans. Et nous pouvons dire que c’est une réussite. on abuse beaucoup de la passion des jeunes starters, qui sont trop peu rémunérés pour ce qu’ils font. »

Auteur: Jan Deceunynck | Image: Daniël Rys