COACHING DE CARRIERE EN CAS DE RESTRUCTURATION

Voir sa carrière prendre fin suite à une restructuration est une pilule difficile à avaler. Surtout pour les travailleurs qui ont travaillé pour une entreprise pendant de nombreuses années. « C’est tout à fait comparable à un processus de deuil », explique Kathleen Brants, coach de carrière chez ACV Puls. C’est dans cette optique que le centre de carrière a immédiatement proposé d’accompagner les travailleurs de Makro lors de la récente fermeture de la chaîne de supermarchés.

« Tout le monde sait qu’un syndicat fournit des conseils juridiques et des orientations pratiques lors d’une restructuration, mais peu savent que ce syndicat peut également offrir un soutien psychosocial », explique Kathleen.

Qu’avez-vous fait dans le cas de Makro ?

Kathleen : Lors d’une réunion syndicale, nous avons expliqué aux travailleurs ce qu’était le coaching de carrière et que nous pouvions les aider à cet égard. Cela leur a plu. En effet, outre toutes les préoccupations juridiques qui les tracassaient à ce moment-là, de nombreux travailleurs ont vécu difficilement la fin de Makro. Beaucoup d’entre eux travaillaient pour l’entreprise depuis 30 ans ou plus. Souvent, ils avaient tissé des liens d’amitié étroits au sein de l’entreprise, qui ont également été compromis par la fermeture. Ils formaient parfois une grande famille. Dans de tels cas, il n’est donc pas facile de se détacher de l’histoire qu’ils ont vécue dans l’entreprise. Lors des séances de coaching individuel, nous avons prêté une attention particulière à l’aspect émotionnel. Il est important que les travailleurs puissent en parler pendant le processus. Il est essentiel de traiter le passé pour élaborer une nouvelle perspective d’avenir. Et, dans de tels cas, c’est agréable d’entendre une personne dire ‘nous ne vous laissons pas tomber, nous sommes là si vous avez besoin de parler’ ».

Mais vous n’êtes pas psychologues, n’est-ce pas ?

Kathleen : « Non. Nous ne prétendons pas l’être. Nous orientions les personnes ayant besoin de voir un psychologue vers le professionnel adéquat. Mais cela n’était pas toujours nécessaire. Dans la plupart des cas, les travailleurs s’en sortent par eux-mêmes, mais ils ont parfois besoin d’un petit coup de pouce pour surmonter le processus de deuil. Ce processus est tout à fait normal lorsque l’on a travaillé au même endroit et que l’on entretient un lien étroit avec l’entreprise depuis si longtemps. Dans le cas de Makro, nous avons remarqué que les syndicats peuvent faire la différence. Et ce, grâce à notre approche individuelle, à nos webinaires et à nos sessions de groupe. Nous explorons différentes méthodologies pour accompagner les travailleurs. Nous avons eu le sentiment que les travailleurs de Makro appréciaient notre approche. Même si nous ne pouvions pas apporter de solution immédiate. Car cela fait bien entendu aussi partie de la réalité. »

 

« Faire ses adieux à une carrière de plusieurs années est un processus de deuil »

 

Que voulez-vous dire ?

Kathleen : « On ne peut pas aider tout le monde. Parfois, l’avenir n’est pas radieux et les opportunités sont rares. Dans le cas de Makro, nous avons remarqué que les travailleurs des services centraux ont rapidement trouvé de nouvelles opportunités. Les travailleurs qui avaient été promus à des postes de responsable ou ceux du marketing ou de la comptabilité ont trouvé un nouvel emploi relativement vite. En revanche, les personnes qui occupaient le même poste depuis des années, dans des fonctions plus exécutives, telles que la vente, ont eu plus de mal à trouver un nouvel emploi. Trouver un nouvel emploi peut s’avérer complexe. Et il est souvent difficile d’accepter la réalité et de faire table rase du passé, ce qui est tout à fait compréhensible. Il est donc logique qu’elles se ne mettent pas directement à la recherche d’un nouvel emploi lorsqu’elles ne sont pas prêtes. Elles ont besoin de plus de temps pour encaisser le coup. »

Cette approche n’est-elle pas similaire au reclassement professionnel ?

Kathleen : « Pas vraiment. Le reclassement professionnel n’est enclenché que lorsque la restructuration est terminée et que les licenciements ont eu lieu. Notre approche débute plus tôt dans le processus. Dans l’idéal, nous intervenons déjà lors des premières réunions du personnel concernant la restructuration pour présenter nos services. En effet, si l’entreprise prévoit une sérieuse restructuration, il ne faut pas attendre que les décisions soient prises pour entamer la réflexion sur les étapes ultérieures. Il ne faut pas attendre que votre situation soit bouleversée pour commencer à réfléchir à votre propre avenir. Même si vous ne connaissez pas exactement les intentions de l’entreprise à votre égard, vous pouvez déjà commencer à réfléchir à ce que vous voulez. »

D’un autre côté, il ne faut pas non plus chercher un autre emploi si l’on pense que les choses vont s’arranger.

Kathleen :C’est vrai. Tant que l’on se bat pour conserver son emploi, il est difficile d’imaginer un autre avenir. Et bien sûr, les syndicats ne veulent pas non plus inquiéter les travailleurs en leur proposant des solutions potentielles en dehors de l’entreprise. Cependant, il n’est jamais trop tôt pour réfléchir à ce que l’on souhaite en tant que travailleur. Il vaut mieux prendre sa situation en main que de subir ce qui se déroule autour de soi. Réfléchir à ce que l’on veut ne signifie pas qu’il faille changer d’emploi. »

Never Work Alone 2023 | Auteur: Jan Deceunynck | Image: Dries Luyten