ACCUEIL DES ENFANTS : DES PARENTS DÉSEMPARÉS
Un accompagnateur s’occupant de 9 enfants : cela peut ressembler à une mission impossible, mais malheureusement, cette situation reflète la réalité d’aujourd’hui. Les milieux d’accueil pour enfants doivent faire face à toutes sortes de difficultés en Flandre. Pour Nathalie Winters d’ACV Puls, il est grand temps d’y remédier.
Que se passe-t-il exactement dans le secteur de l’accueil des enfants ?
Winters : « Les parents et futurs parents sont confrontés à une pénurie d’accompagnateurs d’enfants. On assiste même à la fermeture de certains groupes d’âge en raison d’un manque de personnel. Lorsque cela arrive, les parents n’ont plus qu’à chercher une autre solution.
Prenons l’exemple de Femke, qui a accouché en août. Elle avait trouvé une accueillante depuis des mois, mais lorsqu’elle l’a contactée après l’accouchement, il s’est avéré qu’elle était enceinte de trois mois. En septembre, Femke a dû relancer ses recherches. »
Femke Peeters : « Vinn venait de naître et je devais à nouveau chercher une solution. À cette époque, j’ai vraiment contacté tout le monde. J’ai même lancé un appel sur Facebook. Finalement, j’ai trouvé une crèche qui venait d’ouvrir à Zoutleeuw. Elle se trouve à 20 minutes de chez moi et à 40 minutes de mon lieu de travail. J’allais donc devoir faire une heure de route en courant à droite et à gauche. Heureusement, ma belle-mère et moi avons continué à chercher et avons fini par trouver une place à Lummen en dernière minute. Tout s’est donc arrangé, mais cela nous a causé beaucoup de stress à une période où nous voulions simplement profiter de l’arrivée du bébé. »
Comment expliquer cette importante pénurie de personnel ?
Winters : « La profession d’accompagnateur d’enfant est un métier en pénurie depuis des années : elle est de moins en moins attrayante. Tout d’abord en raison de la pression du travail. Le ratio est aujourd’hui d’un accompagnateur pour neuf enfants dans l’accueil collectif, et d’un pour huit dans l’accueil individuel. On peut quasiment parler de travail à la chaîne. Les accompagnateurs doivent souvent se limiter aux tâches de base.
Les enfants ne reçoivent plus depuis longtemps l’attention qu’ils méritent, ce qui est préoccupant. Il est pratiquement impossible pour les accompagnateurs de consacrer du temps à leur développement moteur et émotionnel. Sans parler de les préparer à l’école… La qualité de l’accueil régresse, malgré tous les efforts des accompagnateurs. »
« Au problème de la pression du travail s’ajoute celui de la rémunération. Celle-ci varie fortement en fonction de l’agrément et du subventionnement de chaque initiative d’accueil. Il y a une inégalité structurelle au niveau du nombre de jours de vacances et du salaire.
Si vous travaillez en milieu d’accueil extrascolaire ou dans une crèche indépendante, vous recevez, en début de carrière, jusqu’à 600 euros brut en moins par mois, pour une occupation à temps plein. Votre salaire n’augmente pas avec l’expérience acquise, si bien qu’au bout de 20 ans, vous vous retrouvez avec la moitié du salaire mensuel de votre collègue qui travaille en milieu d’accueil subventionné.
Enfin, il y a un manque considérable de reconnaissance sociale pour le métier d’accompagnateur d’enfants. Cette combinaison de facteurs rend la profession terriblement inattrayante. »
Quelles mesures ont déjà été prises à cet égard ?
Winters : « À partir de janvier prochain, l’autorité flamande va débloquer 115 millions d’euros pour les milieux d’accueil. Cela va permettre d’harmoniser en partie les salaires et de créer des places d’accueil supplémentaires. Malheureusement, ce budget ne suffira pas pour adapter le ratio accompagnateurs/enfants. Il faudrait plus d’argent. Beaucoup plus.
L’ACV participe à un projet pour l’avenir des milieux d’accueil. L’agence « Opgroeien » développe un plan d’action stratégique, de manière participative et en concertation avec les experts de terrain. Celui-ci sera assorti d’un plan financier.
Le prochain gouvernement sera également chargé de poursuivre ce travail et de prévoir les moyens nécessaires. À l’ACV, nous participons à la concertation et veillons à la mise en œuvre des plans. »
À quoi ressemble le plan d’approche ? Et quel rôle l’ACV peut-elle y jouer ?
Winters : « Le plan sera axé sur la force de travail dans les milieux d’accueil et sur la fonction pédagogique, sociale et économique. Notre plan sectoriel pour les milieux d’accueil s’inscrit parfaitement dans ce cadre. L’ACV se concentre sur les objectifs suivants : un salaire égal pour un travail égal, une réduction de la pression du travail grâce à un ratio de 1 pour 5, et des statuts de travailleur corrects pour les accueillant(e)s.
Avec l’ACV, nous influons régulièrement sur le gouvernement flamand en discutant des problèmes et en attirant l’attention sur ceux-ci. En outre, nous développons avec nos militants un plan d’action stratégique. Nous avons déjà atteint de jolis résultats dans ce domaine en 2022. Cela nous encourage à poursuivre sur notre lancée en 2023.
En tant que syndicat, nous voulons contraindre la société et nos dirigeants à faire d’autres choix politiques. Investir dans l’accueil des enfants, c’est se soucier de l’avenir. Un milieu d’accueil qualitatif offre aux parents la possibilité d’aller travailler l’esprit tranquille et d’acquérir un revenu, lequel leur permettra d’améliorer leur niveau de prospérité et, idéalement, de bien-être. »
Que peuvent faire les parents et les travailleurs des milieux d’accueil ?
Winters : « Je leur conseille de nous suivre sur les réseaux sociaux, de s’affilier à l’ACV et de participer à nos actions non lucratives. »
Never Work Alone 2023 | Auteur: Tine Sinnaeve | Image: Shutterstock